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Retour à la page sur les Arbres Retour à la page sur Tours et ses arbres après 2012 Le 27 mars 2018,
Voilà presque cinq ans que je n'ai pas écrit sur les arbres à Tours. Pourtant rien ne semble s'arranger, la coupe déborde même, d'où cet article... Comme je l'avais expliqué, il y a dans cette ville une culture anti-environnementale puissamment ancrée. Elle apparaît très rétrograde à nombre de citoyens, car dans l'opinion publique, on sent se développer un plus grand respect envers ces amis végétaux, notamment avec le succès du livre de Peter Wohlleben "La vie secrète des arbres". La célèbre rue Nationale, débarrassée de ses voitures, aurait pu devenir un symbole d'un renouveau arboré dans le jardin de la France : elle est complètement minéralisée, se transformant en fournaise les jours les plus chauds de l'été. Après les peupliers et les tilleuls, ce sont les saules pleureurs qui disparaissent, souvent abattus, rarement plantés... Cette culture urbanistique minérale ignore le premier des dix commandements de Francis Hallé, le respect des arbres. Notamment, la chute d'un d'entre eux peut être prétexte à des abattages massifs, comme sur l'île Simon. Dernièrement, ce sont tous les cèdres du jardin des Prébendes qui doivent être abattus comme il est expliqué sur cet article de la Nouvelle République (NR) que je vais commenter tant il illustre l'état d'esprit des décideurs tourangeaux, ce journal servant à relayer leurs paroles et leur état d'esprit. Le titre en est à lui seul l'illustration : "Tours : pourquoi il est nécessaire d'abattre les cèdres au jardin des Prébendes". On n'a pas le choix, à Tours il est nécessaire d'abattre, les citoyens doivent impérativement approuver la décision municipale, ils doivent se plier à cette exécution des ennemis de l'homme et de l'enfant. Un d'entre eux ayant été blessé par la chute d'un cèdre, le "principe de précaution" oblige à abattre tous ces individus devenus dangereux. Il s’agit d'ailleurs d’une utilisation abusive et fautive de ce principe, car son objectif d’origine est de ne pas développer des technologies si d’importantes incertitudes persistent sur les risques qu’elle peut engendrer. Quand une voiture blesse un enfant, utilise-t-on ce principe de précaution pour mettre à la casse toutes les automobiles du même type ? On a plus de respect pour une voiture que pour un arbre, comme si on ne pouvait pas vivre sans voitures, comme si on pouvait vivre sans arbres... Et que dire de la pollution ? Pourtant plus personne n’ignore les conséquences mortifères de masse de la pollution automobile en ville. Certes ce n’est pas spectaculaire et ne marque pas les esprits, mais les statistiques sont accablantes, beaucoup plus que celles des accidents par chûtes d'arbres, qui semblent tellement faibles que je n'en ai pas trouvé trace sur la Toile. Va-t-on abattre tous les platanes qui bordent nos routes par crainte qu'ils tuent des automobilistes en tombant ? Certaines communes, certains départements sont allés en ce sens et, des années plus tard, on s'est rendu compte qu'il y a plus d'accidents mortels sur une route dégagée que sur une route bordée d'arbres... Septembre 2017, jardin des Prébendes. Au passage, on lit que ça déplaira aux "défenseurs de arbres", comme si ceux-ci étaient des attardés n'ayant pas le sens des responsabilités. Je le dis ici avec colère : les extrémistes sont ceux qui abattent tous les arbres sous prétexte que quelques uns sont dangereux. En ce sens, Madame Myriam Le Souëf, adjointe au maire en charge des parcs et jardins, Madame Christine Chasseguet, directrice du service parcs et jardins, et Monsieur Jac Boutaud, responsable du patrimoine arboré de la ville et - à mon sens - la caution scientifique de la municipalité, sont des extrémistes qui nous baratinent quand ils prétendent aimer les arbres. Les "défenseurs des arbres" ont une vision beaucoup plus nuancée. Ils comprennent qu’on puisse être amené à abattre certains sujets jugés dangereux. Encore faut-il présenter précisément les risques. Tout n'est pas noir ou blanc, d'un côté les méchants arbres et de l'autre les gentils. Il y a plusieurs degrés de dangerosité. Abattre les plus menaçants, voir comment évoluent les autres, en restant vigilant. Mettre en place des protections là où c'est possible. Considérer qu'un arbre malade n'est pas toujours dangereux et peut encore vivre longtemps. Ces nuances semblent absentes de l'état d'esprit des gestionnaires des arbres municipaux, qui en cachent les nuances en ne montrant pas l'expertise. L'opacité de la procédure et l’instrumentalisation de la presse sont des signes de l'arbitraire... Supposons même que les analyses effectuées donnent les résultats très sévères, tels qu'ils sont exposés dans la NR : "Six sur huit ont montré des faiblesses. [...] Les deux autres sont en relative bonne santé, mais, situés à côté de sujets qui doivent être abattus, ils risquent de perdre en stabilité". Quel risque ? On vient d'abattre un platane en face de la gare, boulevard Heurteloup, (on ne sait trop pourquoi, la base du tronc est saine), faut-il tout de suite abattre ses voisins qui risquent d'être déstabilisés ? Quel est ce "principe de précaution" qu'on utilise de façon arbitraire ici et pas là ? Et pas dans les autres communes ? Ne vaut-il pas mieux attendre d'être sûr qu'ils soient déstabilisés avant de leur appliquer la solution fatale ? Mars 2018, boulevard Heurteloup, face à la gare, un platane abattu sur la gauche. Autres propos : "Le jardin créé dans les années 1870 est arrivé à maturité. Et exige un suivi plus méticuleux avec la mise en plan d'un plan de gestion". Un plan de gestion en soi n'est pas mauvais, mais ça dépend qui le gère. Avec des personnes tel que le trio déjà cité et en plus l'Architecte des Batiments de France qui distribue les indulgences pour minéraliser à tout va (la rue Nationale c'est lui et son prédécesseur) (la place Châteauneuf aussi), c'est inquiétant... S'il y avait un plan de gestion respectant les arbres, on n'abattrait pas huit cèdres d'un coup, on agirait progressivement sur les plus dangereux. Dans la nature, jeunes et vieux sujets se côtoient, les jeunes bénéficient de l'expérience des vieux, comme le montre Peter Wohlleben. Pas à Tours, on les envoie à l'abattoir aujourd'hui et on en replante dans les mêmes conditions pour recommencer... En ce lieu très bas et très humide de Tours, ne convient-il pas de s'interroger sur la pertinence d'y planter les mêmes variétés de cèdres ? Cette exécution massive de huit cèdres, quatorze même en comptant ceux abattus depuis 2013, n'est-elle pas la preuve d'une incapacité à gérer les arbres dans la durée ? Je me rappelle un bel exemple, à Chanceaux-près-Loches, là où avait lieu "La forêt des livres" de Gonzague Saint Bris sous une allée de platanes. En 1995, il était prévu de tous les abattre sur dix ans, sauf un. 50 abattus sur 51. Au final seuls 3 avaient été abattus, les 48 autres vivaient encore en 2009 (voir cet article de la NR du 12 septembre 2009 cité en page 202 de mon livre Tours et ses arbres qu'on ne laisse pas grandir.. Pour cela, il faut d'abord respecter les arbres et vouloir sauver ceux qui peuvent l'être, et non les considérer tous de la même façon, la pire. En usant de novlangue pour remplacer le mot "abattage" par "démontage". Il y a lieu de s'étonner qu'on replante des cèdres à un endroit où, arrivés à maturité (150 ans c'est jeune pour eux), on les abat tous. A Tours on ne laisse pas les arbres vieillir. Sauf exceptions, comme le cèdre du jardin du musée des beaux-Arts. Ceux des Prébendes n'ont pas cette chance, comme beaucoup d'autres arbres dans la ville, ils ne sont ravalés au rang de meubles en kit que l'on démonte et remonte de temps en temps. Et tous ensemble, c'est mieux pour l'esthétique... Quel mépris pour la nature. On en arrive, à Tours, au stade de l'arbre bibelot avec les arbrisseaux en pot, mobilier urbain que l'on déplace à volonté. On aseptise, plus besoin de s'occuper des feuilles mortes, on gère la nature, on la musèle, on lui interdit de s'exprimer trop librement... Place Châteauneuf, récemment réaménagée, un des rares endroits dans le vieux Tours où on aurait pu planter des arbres à haute tige... Ce sont les mêmes décideurs qui veulent gérer à leur façon le jardin des Prébendes... Pour finir quelques anecdotes, parmi bien d'autres qu'on ne connaît pas, tant c'est ordinaire :
Quartier Velpeau, 31 rue du Dr Fournier, le 21 mars 2017 et le 21 mars 2018. Le promoteur délinquant, soutenu par la mairie, a rasé tout l'espace arboré. Dans sa demande de permis de construire, il n'avais mis aucune photo du jardin, alors qu'il est obligatoire d'en présenter au moins deux. En ce quartier pollué par l'autoroute et trois voies routières de passage, avec très peu d'espaces verts publics, c'est le plus grand espace vert qu'on ait rasé depuis très longtemps. Pour d'autres irrégularités, trois associations environnementales et dix reverains ont demandé le retrait du permis pour cause de fraude. La mairie, sans argumenter, continue à defendre le projet. Détails sur cette page voisine. Communiqué de l'AQUAVIT du 5 avril 2018 : Tours : et maintenant des abattages d’arbres dans les jardins patrimoniaux !. Photos prises le 22 avril 2018. Le périmètre de sécurité ("Il est impératif de respecter ce périmètre et d'utiliser les autres allées") n'était pas du tout respecté, la peur d'une chûte de cèdre était complètement absente... L'abattage massif est prévu pour le mois de juin 2018 : article du 28 avril sur Infos-Tours. Article de La Nouvelle République du 3 mai relatant très partiellement une réuninn publique de la veille, annonçant les abattages pour mai et septembre. Il est désolant d'entendre des responsables dire qu'en ville un arbre est vieux à 100 ans... Tours est plus que jamais la ville où on ne laisse pas grandir les arbres (titre de mon livre de 2012)..
Alain Beyrand
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