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Le 17 juin 2009, mise à jour du 19 juin
Le bois de Grandmont n'est pas à Tours Est (entre Loire et Cher, côté est) mais à Tours sud (au sud du Cher), mais comme il est le poumon vert de Tours, l'endroit le plus boisé, il concerne tous les Tourangeaux. C'est pourquoi s'intéresser aux abattages de grands arbres sur Tours-Est amène aussi à suivre ce qui se passe dans ce bois qui, il y a 50 ans, avait été à moitié détruit par le maire de l'époque, Jean Royer.
A la va-vite, sans autorisations, une trouée dans les bois de Grandmont ? |
Le SITCAT, Syndicat Intercommunal des Transports en Commun de l'agglomération Tourangelle, a annoncé fin mai son intention d'entamer les travaux d'aménagement de ligne de bus reliant le lycée Grandmont à l’Hôpital Trousseau dès la mi-juin, en commençant par l'aménagement de la rue François Bonamy. La nouvelle était passée pratiquement inaperçue, on le voit sur ce triomphant et anesthésiant petit article du 30 mai de La Nouvelle République, où yop la boum "site prope", piétons, vélos, "meilleure desserte", "c'est bon pour tout le sud", améliorations et félicitations sont à l'honneur grâce à de simples "travaux" sur lesquels rien du tout n'est précisé...
Cette consternante désinformation cache une opération illégale. Le tracé choisi met en péril des équilibres biologiques sur des terrains gérés par le CROUS et l’Université et provoquerait une forte dégradation environnementale. Sa mise en oeuvre contreviendrait directement à plusieurs dispositions règlementaires :
- Aucune étude d'impact environnemental n'a été réalisée, alors qu'elle est nécessaire préalablement à tout aménagement de cette ampleur (code de l'environnement).
- Toute intervention sur des lisières de parcelles boisées nécessite leur déclassement préalable (code de l'urbanisme), procédure longue et complexe qui implique la révision du POS. le déclassement des parcelles concernées n'a pas été obtenu par le SITCAT et la modification du POS n'est pas envisagée.
- La déforestation de ces lisières nécessite une demande d'autorisation de déboisement auprès de la DDAF (code forestier). Aucune demande d'autorisation n'a été déposée.
Tout est prêt pour que ce qui est à droite de la limite orange soit rasé.
Exemples d'espèces animales et végétales protégées attestée sur les parcelles concernées : salamandres, chauves-souris arboricoles, Lucane cerf-volant et Grand Capricorne, Spiranthe d'Automne (orchidée), etc...
Le plus grave serait sans doute que cette trouée amènerait à rompre un corridor biologique qui s'est naturellement créé à l'extrémité boisée de la rue Bonamy. Les espèces vivantes se trouveraient davantage isolées et nombre d'entre elles seraient alors condamnées à plus ou moins brève échéance.
Le SITCAT a fait quelques petites concessions. L'emprise des travaux rue Bonamy a été revue à la baisse et la mise en oeuvre des travaux Avenue Monge est retardée d'un an. Toutefois ce deuxième tronçon prévoit encore l'abattage d'une bande forestière de 4 à 6 m de large. La déforestation serait encore plus massive sur la lisière du bois donnant sur l'avenue de Bordeaux (ex nationale 10), entre le bout de la rue Bonamy et la route de Loches (RN143).
L'ASPAS (Association pour la Protection des Animaux Sauvages) s'est montrée prête à porter plainte dans une lettre envoyée le 18 juin au SITCAT, au maire, au préfet et à la NR (contenu ici). Elle demande qu'on lui envoie les documents suivants dont aucun n'existe :
- La délibération du Conseil municipal décidant des travaux ;
- Le certificat d’affichage donnant avis de l’enquête publique ;
- Le dossier d’enquête publique ;
- Les conclusions du commissaire enquêteur ;
- Le dossier d’étude d’impact ;
- L’arrêté déclarant l’utilité publique du projet ;
- Les différents avis rendus à ce sujet.
Le SITCAT est bien sûr lié à la communauté de communes Tours Plus et à la commune de Tours, toutes deux présidées par Jean Germain, successeur de Jean Royer dans la continuité, qui se prévaut d'exemplarité environnementale, notamment parce que cette ligne de bus préfigurera la seconde ligne de tramway reliant Saint-Pierre-des-Corps à l'Hôpital Trousseau de Chambray-lès-Tours, à l'horizon 2015-2020.
L'autoroute Tours - Le Mans a été déviée pour sauvegarder le scarabée pique-prune. Pour éviter un tel revers, la méthode utilisée consiste à mettre tout le monde devant le fait accompli sans se préoccuper des autorisations. La population ne sera consultée qu'ensuite...
Oui, tout laisse à penser qu'il s'agit d'un coup de force ayant pour but de passer outre à des autorisations qui ne seraient probablement pas accordées.
Le 17 juin, un collectif nommé tramwaygrandmont appelait à réagir :
Pour ceux qui peuvent RDV ce vendredi à partir de 9h à l'angle de la rue Bonamy et de l'avenue Monge pour empêcher l'abattage des arbres. Et pour tout le monde entre 12h et 14h, pour partager nos victuailles et nos idées au cours d'un pic-nic citoyen sur le chantier de la rue Bonamy (amenez vos paniers repas). Merci de faire circuler cette information au plus grand nombre
Mon intervention du jeudi 18 juin soir au CVL-Est, même si elle fut écourtée, m'a permis d'exposer la situation à une assemblée qui ignorait totalement le sujet. Voir cette page intitulée "La démocratie locale muselée".
De plus, après cette réunion agitée, je me suis adressé, par l'intermédiare d'un conseiller municipal, à M. Germain (maire de Tours et président de la communauté de commune Tours Plus) par courriel (envoyé en tout début de matinée) en lui exprimant mon indignation et en espérant qu'il suspendrait l'abattage.
Le rassemblement du vendredi 19 juin au matin |
Je suis arrivé au rassemblement du collectif à 9 heures. J'ai tout de suite vu que les choses étaient très sérieuses avec un grand chêne déjà abattu (la veille à 18 h) et la pose de treillis oranges délimitant les zones à raser. Toutefois aucun nouvel abattage ne semblait arriver. Ceux qui étaient prêts à s'enchainer aux arbres n'ont heureusement pas eu à le faire.
La présence active de deux conseillers municipaux Verts (appartenant à la majorité de M. Germain) confirmait ce que j'avais noté la veille au soir : les élus ignoraient complètement que cet abattage se déclenchait.
Les treillis oranges ont été enlevés et, bien sûr, des mesures étaient prises pour que les habitants présents communiquent rapidement entre eux si l'abattage reprenait, afin d'agir au plus vite.
Le soir, selon un reportage de TV Tours, le SITCAT avait décidé l'arrêt momentané des travaux et l'organisation lundi d'une rencontre avec les associations concernées. Rencontre que celles-ci recherchaient depuis trois mois... Et rencontre qui finalement n'a pas eu lieu... On sait seulement que les travaux sont provisoirement suspendus. Une réunion du SITCAT le jeudi 25 juin amènera peut-être du nouveau.
Quant aux Verts du conseil municipal, ils ont tenu une conférence de presse (article NR) où ils réaffirment : « Le maire décide, et discute après. Jean Germain communique beaucoup mais une fois que les décisions sont prises ». Si cela perdure, à quoi bon rester dans la majorité municipale ?
Le 25 juin au matin, le SITCAT sort le nouveau plan de bus pour septembre 2009, avec distribution massive. Le tracé prévu dans le bois de Grandmont est bien là.
| Un écosystème millénaire coupé en deux !!
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Le soulagement du jeudi 25 juin au soir |
La réunion du SITCAT le 25 juin en fin d'après-midi était ouverte au public, comprenant quelques défenseurs de l'environnement. Ils ont vu et entendu Jean Germain, président du SITCAT, maire de Tours, président de la communauté de communes de Tours Plus, demander à renoncer au tracé initial à travers le bois de Grandmont.
La partie du bois sensible ne sera pas touchée. Le tracé de remplacement apparaît satisfaisant, tout du moins dans une première approche. Mais, même si ça sera moins destructeur, il est probable qu'il y aura d'importants abattages avec le nouveau tracé. Une politique intelligente consisterait à récupérer de la place dans ces bois (des bâtiments transférés ailleurs...) pour replanter...
Le dossier était "mal ficelé" sur le plan juridique et c'est cet aspect révélé par la mobilisation qui a été déterminant. Le rouleau-compresseur technocratique de destruction d'écosystèmes a, pour une fois, fait marche arrière. Cela contribuera-t-il à une prise de conscience de la population ?
Ce sont maintenant les cèdres et arbres de l'avenue de l'Europe (à Tours Nord) et les tilleuls de la place Mame (à Tours Ouest) qui sont menacés (voir ici).
Liens complémentaires :
La récidive du 3 avril 2013 : le maire de Tours, président du Sitcat et de l'agglomération Tours Plus, récidive en 2013 en voulant détruire le corridor biologique. A nouveau une mobilisation citoyenne s'organise, voir sur cette page de l'AQUAVIT
Le corridor est au fond, au bout de cette rue Bonamy.
Le 3 avril 2013, comme le 19 juin 2009, un rassemblement militant a marqué l'opposition à la destruction du corridor, sans qu'une enquête publique n'ait validé ce trajet d'un Transport en Commun en Site Propre. Le recours en référé-suspension déposé la veille par l'AQUAVIT semble avoir permis le report de la destruction jusqu'à la décision de Justice, qui je l'espère, permettra de reporter tout cela à l'enquête publique du nouveau PDU qui doit se dérouler avant la fin de cette année.
Alain Beyrand
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