2.5 De Grenoble à Nîmes, en passant par Stuttgart
La cause de l’arbre en ville est universelle et des hommes et des femmes partout dans le monde se battent pour les préserver,. On est donc informé de ce qui se passe dans d’autres villes et on peut comparer. La ville de Tours est-elle un cas extrême de dégradation de son patrimoine arboré ? J'en ai bien l'impression et avec moi de nombreux tourangeaux le pensent, et au-delà d’eux à travers les villes de France des gens maintenant bien informés le déplorent aussi.
Mais malheureusement ce n’est pas le seul cas, loin de là. Ailleurs aussi des maires autocrates, des équipes municipales qui ont perdu le sens de l'intérêt général organisent une épuration de la trame arborée de leur ville. De nombreuses similitudes existent dans les méthodes et les discours, leur brutalité, leur grossièreté démagogique sont une humiliation permanente aux populations. La première d'entre elles est de se trouver face à une gouvernance autocratique qui génère un manque cruel de concertation et impose ses décisions par la force de la politique du fait accompli, en habillant ses méfaits d'une communication anesthésiante promettant de beaux lendemains et masquant les dégâts.
8.2.1 Marseille 1993, parc Longchamp et parkings
C'est, me semble-t-il, la plus longue lutte en France, avec des accalmies et des rechutes. Voici les points de repère que j'ai trouvés sur le site www.parc-longchamp.org de l'association "SOS Longchamps".
En 1985, le jardin Zoologique a fermé en tant que tel : 7 ha de terrain se libéraient ainsi en plein centre ville et ne pouvaient que susciter les convoitises.
En 1993, M Vigouroux [successeur de Gaston Defferre] étant Maire de Marseille la Ville envisage de créer à l’intérieur du jardin une aire de stationnement pour les véhicules municipaux. Beaucoup d’élus s’en indignent et parlent de « blessure irréparable dans cet îlot de verdure qu’est le jardin Zoologique ». Peine perdue, l’aqueduc est grillagé et un parking est créé entre l’aqueduc et l’impasse Ricard Digne. Une autre partie du jardin est aliénée pour abriter des véhicules du nettoiement place Louis Rafer. Un autre parking, toujours à usage privé pour les municipaux accueille une centaine de voitures au bas du bd du Jardin Zoologique. C’est donc déjà, dès 1994, plus de deux cents places de parking privé créées dans le jardin en prenant sur l’espace public, et les riverains commencent à s’en inquiéter
En 1995, les élections approchent et les inquiétudes des riverains et usagers de Longchamp s’expriment. Mr Gaudin et Muselier axent alors leur campagne électorale sur la protection et la mise en valeur de ce site « remarquable » et ils affirment dans leur programme : « ce parc est l’unique poumon vert des arrondissements du 3ème secteur et les Marseillais sont très attachés à sa sauvegarde. Nous proposerons sa réinscription en zone verte lors de la prochaine révision du POS et ferons tout pour que ce site devienne le lieu de rencontre privilégié des habitants ».
En 1998 et 1999 le Palais Longchamp et les jardins sont classés aux Monuments Historiques, l’aqueduc est inscrit.
En 2000, la révision du POS* est en route. Surprise pour les riverains de Longchamp : malgré les promesses réitérées des élus l’Espace Boisé Classé ne couvre pas l’étendue du jardin. Bizarrement la parcelle 33 section A des Cinq Avenues, à l’angle de Cassini et du Boulevard du Jardin Zoologique se trouve en dehors de l’EBC. Interpellé à ce sujet, M Muselier répond par courrier en date du 22 juin 2000 : « Je vous confirme que je demande à nouveau à M Vallette, adjoint au maire, de classer l’ensemble de ce site en zone EBC afin de répondre aux engagements pris ultérieurement. Je ne manquerai pas de vous tenir informé du suivi de cette demande légitime. » Cette promesse comme les précédents ne sera suivie d’aucun effet.
Suivent diverses annonces, plus ou moins rassurantes. Le 18 novembre 2003, les projets de parkings semblent abandonnés…
Février 2007, la réunion d’information promise se fait toujours attendre mais on apprend qu’en novembre 2006 la société QPark a déposé une demande de permis de construire pour un parking de 626 places à l’angle du bd Cassini et du bd du Jardin Zoologique, sur la fameuse parcelle 33 alors qu'il est dans un site classé et située dans un périmètre protégé de 500 m autour d’un Monument Historique.
Le 6 août 2008, le permis de construire est accordé pour un parking de 600 places. Les élus du secteur nient avoir jamais rien promis et prétendent que ce projet à cet endroit a fait l’objet d’un large consensus, alors que les Marseillais n'ont été ni consultés ni informés. La Ville affirme qu'un parking était prévu à cet endroit au PLU* ? Faux : les planches du PLU* sont visibles à l'urbanisme et ne font rien apparaître de tel !
En attendant, le jardin le plus fréquenté de Marseille est ainsi laissé à l’abandon. On ne peut s’empêcher de penser que la Ville ne voit aucun intérêt à entretenir un site voué à la disparition. Car une chose est désormais certaine : la construction du parking causera à très court terme le dépérissement et la mort prématurée de toutes les parcelles environnantes. Le Collectif "SOS Longchamp" ne doit donc pas baisser les bras : le dossier devant la Cour Administrative d’Appel se constitue petit à petit et pour le moment il faut surtout s’armer de patience. Ces propos datent du 13 novembre 2010. Rien de bien nouveau depuis.
Manifestement, nous n’avons pas tous le même sens de la poésie. Sans parler du respect pour ce jardin et ces gens qui, il y a plus d’un siècle, ont planté ces arbres en pensant à nous. Si rien n'est fait, un projet de parking souterrain défigurera d'ici peu, le Parc Longchamp, l'unique grand parc public du centre ville de Marseille.
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C'est là une lutte au très long cours avec une stratégie municipale de pourrissement et d'encerclement. En cela, elle se distingue de celles qui vont suivre.
8.2.2 Grenoble 2004, parc Mistral et stade de foot
C'est au nom de la construction d'un stade de football que la municipalité grenobloise a décidé d'abattre 292 arbres du parc Paul Mistral. Pendant 3 mois, en plein hiver, du 2 novembre 2003 au 12 février 2004, des jeunes grenoblois se sont installés dans 15 cabanes montées dans les branches d'arbres séculaires. L'une était à 30 mètres de hauteur ! Ce fut une lutte vraiment épique et même emblématique du combat universel pour la préservation du patrimoine végétal en ville. Elle eut un fort écho national. Je me souviens l'avoir suivie, de Tours. Après tous les recours possibles et malgré un soutien très large de la population, la municipalité a maintenu son projet. Les abattages commencèrent le 2 février. Un assaut de 150 CRS fut repoussé le 10 février, mais celui du surlendemain fut fatal, avec l'intervention du GIPN, Groupe d'Intervention de la Police Nationale.
Voici des extraits de l'article publié ce 12 février 2004 sur le site du Nouvel Observateur :
Depuis début novembre, une trentaine de jeunes "éco-citoyens" se relaient jour et nuit dans les cabanes pour empêcher l'abattage de 200 arbres, malgré une injonction du tribunal administratif de quitter les lieux.
Ils ont installé dans les arbres 20 abris, construits avec des planches de récupération et des bâches, donnant au parc une allure de village d'Astérix. […]
Les policiers ont fait usage de grenades lacrymogènes lorsque des manifestants ont essayé d'attaquer les palissades qui isolent le chantier d'abattage des arbres que plusieurs dizaines d'"éco-citoyens" tentent de sauver de la destruction.
Une trentaine des ces militants sont toujours réfugiés dans des abris construits dans ces arbres. Leurs sympathisants regroupés derrières les palissades sont au nombre d'une centaine.
Les policiers de la section d'intervention ont établi un périmètre de sécurité qu'ils ont fait quitter, sans violences de part et d'autre, à plusieurs dizaines d"éco-citoyens". Ils ont commencé vers 7h 30 mardi à faire évacuer la vingtaine de cabanes occupées par des "accrobranchistes" installés dans les arbres. Ils disposent pour cela d'un camion avec une nacelle capable de monter à 20 mètres de haut. […] Des ouvriers participant à l'opération ont commencé peu après à démonter plusieurs cabanes au sol provoquant la réaction des "accrobranchistes", qui ont grimpé plus haut dans leurs arbres. Ils ont également entrepris de construire une palissade afin d'isoler plusieurs centaines d'autres manifestants, amassés autour du périmètre de sécurité.
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Seulement un ginkgo biloba et un orme, jugé comme "symbole fort de Grenoble", ont été "épargnés", au moins dans un premier temps.
Grenoble 2004 (composition d'après le site arbresvenerables.free.fr)
Ce qu'ont fait les militants du Codat* à Tours est un petit prolongement de cette lutte dantesque. Voici quelques autres éléments développés par les "éco-citoyens" qui auraient pu être repris sur Tours (j'ajoute mes remarques entre crochets) :
- La lutte pour le parc montre que, quelque soit notre âge et notre façon de faire, il est possible de résister concrètement et de désobéir quand on considère que les politiques nous manipulent.
- A l'heure actuelle, un recours a été déposé [comme à Tours, le référé-suspension sera rejeté]. La justice n'est cependant pas neutre, elle est souvent du côté du pouvoir.
- Cette résistance est d'ores et déjà victorieuse [je n'irai pas jusque là à Tours, mais il est vrai qu'il y a des côtés positifs] par toutes les rencontres et solidarités qu'elle a permises.
- Au delà de la destruction du parc, il s'agit de s'opposer à une logique de développement de l'urbanisme.
- La mégalopole qu'ils nous préparent ne laissera plus de place qu'aux espaces de consommation et de travail au détriment des lieux de rencontre, de détente et d'échange non marchand [c'est la description du mail du Sanitas…]
- Les Arbres sont avant tout des Symboles de Paix, de Liberté, de Rencontres, d'Amour! Et non de destruction comme l'homme sait bien le faire !
- L'affaire du parc est révélatrice d'une démocratie de façade où le pouvoir est délégué à quelques personnes qui l'exercent ensuite à leur profit, sans prendre en compte les personnes concernées par leurs décisions. La mairie dépense ensuite de grosses sommes en communication et en encarts coûteux en couleurs pour nous laver le cerveau.
- On nous accuse de faire le jeu de la droite contre la gauche. Ne soyons pas dupes, la droite au pouvoir porterait le même type de projets. Il ne s'agit pas d'un problème de partis mais d'un système politique corrompu au service d'intérêts privés.
- En Chine, à Shangaï, si un arbre protégé est abîmé, voir détruit, une amende de plus de 40.000 euros est demandé au coupable. Alors pourquoi pas en France ! Pourquoi pas une Jurisprudence qui permettrait la protection de ces arbres, mais aussi une indemnité importante en cas de destruction des vieux arbres ? [ou plus généralement en cas de destruction jugée non justifiée de n'importe quel arbre, proportionnellement à son âge]
- Pour nous, défendre ces arbres, c'est se réapproprier la vie politique de notre ville et préserver un des rares lieux qui n'est pas dédié uniquement à la publicité, à la consommation, aux voiture et au travail : multiplions ces lieux !
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Il y aussi des éléments qui n'ont pas été dits sur Tours et qui auraient pu l'être :
- Cette lutte pour le parc constitue un tremplin pour réfléchir à de nombreuses autres solutions concrètes en terme de vie et d'urbanisme : moins consommer et gaspiller, produire localement et se nourrir autrement, mettre en place des transports en commun gratuits, utiliser des énergies renouvelables et des bio-carburants.
- Il est temps de penser en terme de décroissance plutôt que de bétonner et de dépenser plus (spécial dédicace à Bouygues béton).
- Expérimentons d'autres modes d'organisation : autogestion, démocratie directe, il est temps de prendre en main collectivement la gestion de notre ville, notre vie.
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8.2.3 Paris 2010, Porte Dauphine et stade Jean Bouin
2010, sous le titre "Victoire déterminante contre un projet de la Ville de Paris", l'association "Dauphine Environnement" dans le 16ème arrondissement, publie le communiqué suivant :
Choqués par l’abattage cet automne, sans autorisation et en toute illégalité, d’une cinquantaine d’arbres sur la parcelle située 4547 avenue du Maréchal Fayolle à Paris (16ème), les riverains du quartier ont découvert l’existence d’un projet de construction de 135 logements répartis en 4 immeubles mené par Paris Habitat et la Mairie de Paris.
Après les menaces sur le parc Sainte Périne, les projets de construction délirants de la Porte d’Auteuil, du stade Jean Bouin ou encore des pelouses centrales de l’hippodrome d’Auteuil, c’est maintenant au tour d’un espace vert remarquable du 16ème arrondissement, situé en lisière du Bois de Boulogne, d’être la cible de ce plan de bétonnage
Les riverains sont d’autant plus mobilisés que le choix architectural et l’esthétique des constructions envisagées sont extrêmement contestables et porteraient gravement atteinte au quartier. Très décidés à préserver les espaces verts du quartier, ils ont constitué l’Association Quartier Dauphine Environnement, qui compte 3 mois après sa création plus de 500 membres, et ont décidé de demander au tribunal administratif de Paris l’annulation du permis de construire délivré en novembre 2009.
En décembre dernier, ils avaient déjà réussi à contraindre la Ville de Paris à reconnaître l’illégalité de l’abattage des arbres et à dresser un procès verbal à l’encontre de Paris Habitat. Aujourd’hui, ils remportent une seconde victoire, et non des moindres ! Le tribunal administratif de Paris vient en effet de décider de suspendre l’exécution du permis de construire en attendant que le recours en annulation soit jugé au fond.
Rappelons que le juge administratif ne décide de suspendre l’exécution d’une décision administrative qu’en cas d’urgence et que s’il estime qu’il existe des arguments sérieux de nature à justifier l’annulation au fond de cette décision !
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L'association annonce ensuite une réunion d’information en présence de Claude Goasguen, Député et Maire du 16ème arrondissement, de Bernard Debré, Député et Conseiller de Paris, ainsi que des représentants de plusieurs familles politiques de toutes tendances (MODEM, Génération Ecologie). Les Verts sont donc là aussi absents, prisonniers de leur alliance avec des Socialistes bétonneurs.
La même année 2010, dans le même 16ème arrondissement, et cette fois ci avec la participation des Verts, une vigoureuse protestation s'est élevée cintre les abattages abusifs du stade Jean Bouin, où on reconnaît l'emploi trop fréquent d'une étude bidon, du double langage et de la politique du fait accompli (selon une dépêche de l'AFP du 12 juillet 2010) :
La mairie de Paris a procédé lundi matin à l'abattage d'une trentaine d'arbres au stade Jean Bouin (XVIe) dans le cadre de sa démolition-reconstruction, ce qui a provoqué de vives réactions d'indignation chez des élus UMP mais aussi chez les Verts et des associations.
L'association du quartier du Parc des Princes avait défendu vendredi un référé au tribunal de grande instance de Paris demandant la nomination d'un expert pour une étude phytosanitaire des 73 arbres, dont elle estime qu'ils sont en bonne santé pour une écrasante majorité d'entre eux. Selon Agnès Popelin, secrétaire générale de cette association, la juge s'est déclarée incompétente vendredi, "ce qui fait que nous avons fait appel" et que la décision de la cour d'appel est attendue le 15 juillet". Elle a vivement critiqué la mairie qui n'a pas attendu le résultat de l'appel notamment. De même, dans un communiqué, l'association "Val de Seine Vert" a déploré l'abattage "sous l'œil zélé de nombreux vigiles" et a accusé le maire PS de Paris Bertrand Delanoë de tenir un "double langage" alors qu'il a lancé récemment "un plan biodiversité" dans la capitale.
Côté élus, les Verts de Paris et d'Ile-de-France ont dénoncé "l'abattage illégal des arbres de Jean Bouin". "Profitant d'une matinée orageuse et de la période des vacances, les services de la mairie de Paris ont procédé à cette opération dans la plus grande discrétion. Sur les 70 arbres du site, 54 sont menacés. Le tronçonnage de ces arbres est illégal, les procédures judiciaires lancées par plusieurs associations étant encore en cours", selon les Verts. Stuttgart 2010, révolte citoyenne contre la nouvelle gare
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8.2.3b Stuttgart 2010, 300 arbres et 50.000 manifestants
[Malencontrueusement, ce titre a sauté dans le livre, il est ici rétabli]
Le 2 octobre 2010, j'écrivais ceci sur la page du mail du Sanitas :
L'actualité internationale nous interpelle sur un sujet présentant quelques similitudes. La population de Stuttgart se mobilise (défilé de 50.000 à 100.000 personnes chaque semaine !) pour sauver 300 arbres, dont 25 ont été abattus avant-hier. A Tours, au Sanitas, nous avons 177 arbres à sauver, dont 7 ont déjà été abattus...
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Le 7 avril 2011, je parlais à nouveau des abattages de Stuttgart :
Les différences ici sont plus importantes, surtout parce que l'Allemagne m'apparaît plus évoluée en matière environnementale que la France. Chez nous on peut abattre des arbres sous le vague prétexte qu'ils sont à 5 mètres, voire 50 mètres, du passage du tramway ; chez eux, non, on les abat quand ils sont vraiment sur le passage. Chez nous, les défenseurs des arbres n'agissent que quand on peut les sauver sans modifier le tracé de façon importante ; chez eux c'est le tracé en son ensemble qui est contesté. Et puis chez nous, quand on mobilise plus de 50 personnes, c'est beaucoup ; eux ont été jusqu'à en mobiliser plus de 20.000 chaque semaine. Ils ont ainsi obtenu un moratoire et, aux élections suivantes, ils ont renversé le gouvernement local. Chez nous, on évolue à un niveau bien moindre. Seule une petite minorité de la population se révolte. Si on faire l'effort d'élire un conseiller cantonal Vert, il devient transparent... Même les brutalités policières sont moindre. Là-bas, elles ont atteint un tel paroxysme qu’elles ont même effrayé les commanditaires.
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Stuttgart photos Sean Gallup / Getty Images Europe (site zimbio.com)
Le 24 avril 2011, je pointais sur un article du site rue89.fr :
Il montre de fortes correspondances avec ce qui s'est passé à Grenoble et Tours, notamment le manque de concertation, l'arrogance des élus, le "jargon technocratique vide de sens", une résistance non violente, "Cette histoire de gare nous a mobilisés d'abord parce qu'on s'est rendu compte que les hommes politiques ne sont pas transparents", "c'était un projet pour le prestige. Tous les hommes politiques veulent ériger leur tour Eiffel, leur empreinte, mais la ville ne sert pas à cela", "On ne veut plus de ces politiques qui servent les intérêts industriels", "On a été capables de montrer que notre mouvement était non-violent. C'était important de convaincre tout le monde de notre pacifisme pour ne pas faire peur aux habitants, même aux conservateurs", "aspiration à plus de pouvoir citoyen", jusqu'au titre de l'article : "On pense que le progrès ne fait plus le bonheur"...
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Bref on retrouve dans cette mobilisation "Stuttgart 21" la même envie de quitter le XXème siècle bétonneur et "bitumeur" pour aller vers un meilleur XXIème siècle plus respectueux de l'environnement…
8.2.4 Nîmes 2011, micocouliers et tram-bus
Toujours sur la page consacrée au mail du Sanitas, je parlais pour la première fois de Nîmes le 1er avril 2011 : "On apprend que dans un cas similaire au nôtre, les défenseurs des arbres ont gagné". 51 arbres séculaires sont tombés, des platanes et des micocouliers. Voici un résumé des faits repris en grande partie du site www.gardiensdel'ombre.com (joli nom de site).
Fin XVIIe siècle, le « cours » – l’actuel boulevard Gambetta – est aménagé en un temps record, suite à la création brutale du fort et à la restructuration du quartier, sur ordre de Louis XIV. Des arbres sont plantés sur le boulevard. C’est la première promenade urbaine ombragée à Nîmes. Les arbres actuels en perpétuent la tradition. Après la destruction complète de l’enceinte urbaine, fin XVIIIème siècle, les boulevards Victor Hugo et Amiral Courbet sont aménagés. Ils sont aussi plantés d’arbres. Les micocouliers et les platanes font désormais partie de la vie nîmoise.
C'est la construction d'un TCSP* sur pneu, nommé "tram-bus" [ou trambus, tram'bus], qui, à partir du 31 janvier 2011, a provoqué des abattages d'arbres sur ce cours protégé par un Plan de Sauvegarde et de Mise en Valeur (PSMV), sans qu'un permis d'aménager n'ait été délivré. Suite au dépôt d'un référé au tribunal administratif, par deux citoyens, le chantier est suspendu le 9 février. Le permis d'aménager est délivré le lendemain par la municipalité de Nîmes, avec la bénédiction de l'ABF* qui a levé toutes les réserves. Le lendemain 11 février, les deux mêmes citoyens déposent un second référé, pour non respect du PSVM. Le 17 février, les abattages sont à nouveau suspendus, mais pas le chantier. Ca dégaine vite à Nîmes…Et la guérilla judiciaire n'est pas finie. La réglementation de voirie n’est pas respectée en ce qui concerne les travaux à proximité des arbres. Tous les arbres des boulevards en chantier sont en danger. Leurs racines sont sectionnées et mises à mal par les engins. Le 29 mars, un permis d'aménager est suspendu et le chantier est à nouveau stoppé, suite à un référé déposé par l'association ASPIQ au motif que l’étude d’impact environnemental est insuffisante et que les arbres des boulevards sont protégés par le PSMV.
A partir de cette date, les boulevards sont rebouchés et goudronnés. Les tranchées à proximité des arbres sont rebouchées uniquement avec des gravats. Les racines sectionnées n’ont pas été traitées. Les affaires concernant le TCSP* et les arbres seront jugées sur le fond début juillet 2011.
Le 12 mai, le Conseil d’agglomération Nîmes Métropole vote une nouvelle déclaration de projet concernant le chantier TCSP*, un copier-coller de la précédente. Le chantier sera repris dans les mêmes conditions c’est-à-dire de manière simultanée sur les 4 boulevards.
Le 3 juin 2011, le maire signe le Permis Modificatif du projet TCSP* dans le secteur sauvegardé de Nîmes. Les abattages d’arbres du secteur sauvegardé et des places sont maintenus (soit une vingtaine d’arbres). Le 12 juillet, rendant son jugement de fond sur les deux recours des deux citoyens, le Tribunal Administratif ordonne l’annulation de l’abattage des arbres en secteur sauvegardé, l’annulation du permis d’aménager sur ce secteur et enjoint la municipalité à remettre en état les lieu.
Le Conseil d’Etat a ordonné le 24 août 2011 qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le pourvoi formé le 17 février par la Commune de Nîmes et la Communauté d’Agglomération de Nîmes-Métropole.
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Même s’il reste un appel en cours auprès de la Cour d’Appel administrative de Marseille, ce sont des victoires d’autant plus belles que le rapport de forces était particulièrement disproportionné avec, il faut le signaler, une municipalité qui s’autorisait de nombreux coups bas. En parallèle, les défenseurs des arbres ont mené une mobilisation très active des habitants pour s'opposer aux abattages sur place. On lit ainsi sur le site :
Jusqu’à l’attente du jugement, la permanence sur le boulevard se poursuit. En échange de dons de 15 euros et plus, un sac entièrement confectionné par des membres de l’association vous sera remis. Ces sacs ont été coupés, cousus et illustrés (méthode pochoirs) à Nîmes, dans une ambiance conviviale où chacun(e) a partagé un peu de son temps à coudre sur la machine, à mettre les épingles, à peindre, à créer… La tasse de thé et de café jamais très loin, tout comme les repas improvisés…Chaque sac devient ainsi une pièce unique ! Ces sacs permettent de financer les frais de justice. Ils contribuent aussi à faire connaître notre mouvement citoyen qui se prévaut également d’une certaine éthique.
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Le 1er mars 2011, le journal "La Provence" montrait déjà l'importance de la mobilisation :
Le collectif qui reste actif et vigilant a réuni plusieurs centaines de Nîmois pour s'opposer à l'abattage des arbres. Ces citoyens, qui refusent toute récupération politique de leur combat, se sont fermement opposés à l'abattage de 66 platanes et micocouliers en centre-ville.
En début de mois, le collectif s'est d'abord attaché à ralentir les abattages, ce qui a généré une tension telle que le maire a fait intervenir une société en pleine nuit, à l'abri des regards, pour couper les trois platanes qui restaient en face des arènes. Ce soir-là, la situation a bien failli tourner au pugilat : les manifestants prêts à s'enchaîner aux arbres ont été arrêtés par une police qui n'a pas hésité à jouer la démonstration de force.
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Nîmes 2011 (photos du site Les gardiens de l'ombre)
Retour à mon blog, je fais le 7 avril un parallèle entre Tours et Nîmes. Des deux côtés on trouve :
- un maire omnipotent qui décide de tout, joue avec la Loi, et pratique la politique du rouleau compresseur et du fait accompli. Jean-Paul Fournier et Jean Germain, lequel est le clone de l'autre ? Tous deux entonnent à le perfection le chant des sirènes "C'est pas grave, on replantera !".
- un ABF* qui méprise la nature
- un préfet qui laisse faire et soutient
- un mépris municipal envers les arbres
- une place prépondérante laissée à l'automobile
- de l'écoblanchiment à tout va, "préserver notre précieuse qualité de vie", "une cité plus verte", etc.
- un quotidien local qui appuie discrètement mais solidement le maire, filtrant les informations (c'est ainsi que le Midi-Libre a effacé l'association A.R.B.R.E.S. du paysage médiatique)
- des citoyens qui se rebiffent et résistent
- une association qui en appelle à la Justice
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Il y a aussi, bien sûr, quelques différences. La teneur des travaux n'est pas la même, un tram-bus est plus vite installé qu'un tramway. Alors qu'à Tours les abattages se trouvent au début d'un processus long, à Nîmes, ils ont eu lieu alors que les travaux étaient davantage engagés. Leur arrêt a donc été plus gênant pour la population et les commerçants.
Le plus important est ailleurs : le maire est de droite et ne peut pas, comme le nôtre, de gauche, phagocyter aussi efficacement les opposants, notamment les Verts, qui disent "s'opposer le plus vigoureusement possible, à ces coupes". Tout cela, avec un tempérament nîmois moins réservé qu'à Tours, explique que la mobilisation populaire a été plus importante que chez nous.
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Le 6 septembre 2011, le Midi-Libre annonce que le maire de Nîmes a choisi d'amputer la ligne 1 du TCSP* du tour de l'Ecusson, mettant en place une navette gratuite et plantant 55 nouveaux micocouliers de 6 à 7 mètres pour remplacer ceux abattus (pour un coût de 285.000 euros).
8.2.5 Saint-Nazaire 2011, albizias et bus THNS
Voici des extraits d'un article de Thierry Brulavoine, ancien conseiller municipal de Saint Nazaire, publié dans le n°78 d'avril 2011 de "La Décroissance".
Plus de 350 arbres ont été zigouillés dans la principale avenue de notre ville et dans une de ses rues parallèles. Adieu fragrances subtiles des albizias en fleur. malades, les arbres ? Non ! Décapités sur l'autel de la déesse Vitesse ! Car on nous a pondu le Transport à Haut Niveau de Service (THNS) ! "THNS n'est pas seulement un simple bus, avance le président de la communauté d'agglomération, c'est aussi une vision d'avenir (sic) pour aménager notre territoire". Il s'agit d'une "liaison de bus de nouvelle génération en site propre". Ah ça, maintenant le site est propre ; plus un arbre ; plus de sales feuilles en automne. [...]
Evidemment, tout ceci s'est fait sous la houlette du développement durable, pour diminuer la place de la voiture qui pue et qui pollue. Mais c'est, une fois de plus, un projet parachuté par des élus gorgés de vanité, inféodés à la croyance en les vertus du développement économique. La concertation citoyenne ? Réduite aux acquêts avec ses réunions où la pensée PowerPoint anesthésie efficacement l'auditoire.
[...] C'est à la seconde vue du PowerPoint que j'ai réalisé qu'ils avaient décidé de massacrer les alignements d'arbres pour y faire passer le THNS. J'avais alors soulevé le lièvre, lors du conseil municipal de juin 2010. Autant parler à des murs, insensibles ! Les Verts et le PCF ont avalé une nouvelle couleuvre bien verte sous prétexte de développement du réseau de transports en commun".
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Le parallèle avec Tours est frappant ! Encore un cas caricatural de vandalisme des autorités municipales au nom d'un TCSP.
8.2.6 Metz 2011, l'insupportable mise en valeur arborée
Metz est la ville par laquelle Jean-Marie Pelt commence son "Tour du monde d’un écologiste" (Fayard 1990). Le scientifique et grand écrivain de l’écologie y est professeur de biologie végétale à l’université. Au chapitre 5 de son livre, "En partant par la Lorraine", sur le sujet de l’écologie et de l’art de vivre on peut lire "Metz est devenue une sorte de laboratoire où s’expérimente tout ce qu’il convient de faire en matière d’aménagement urbain. Aussi s’y presse-t-on de toute part pour admirer ce modèle réussi de « ré-ennoblissement » d’un ville européenne, fuyant toute concession aux impératif de la mode et de la pseudo-modernité lorsque celle-ci se manifeste par ces architectures médiocre et prétentieuse que l’on ne voit que trop !".
C’était au siècle dernier… Le sacrifice de la ville sur l’autel de la "pseudo-modernité" n'était que partie remise, il est au programme prestigieux de l'actuelle mairie qui d’emblée l'a annoncé ainsi :
Dès lundi 31 janvier 2011, plusieurs projets urbains successifs [dont un TCSP* nommé METTIS de Bus à Haut Niveau de Service] vont nécessiter un abattage de près de 850 arbres à Metz jusqu’au printemps 2012. Cet inévitable abattage d’arbres aura des conséquences sur le paysage de certaines rues. Cependant, de jeunes arbres seront replantés dans un an. Cette disparition dans le paysage urbain n’est que temporaire : 1200 nouveaux arbres vont être plantés d’ici 2013. Il faut savoir que l’abattage a lieu en dehors des périodes de nidifications des oiseaux.
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On note tout de même un peu plus de franchise qu'à Tours où la municipalité n'avait pas dit d’entrée de jeu les choses en face à la population. 100 de ces abattages correspondent à l'aménagement d'une place et d'une avenue, les 750 autres servent à faire "un parcours pour permettre de mettre en valeur le patrimoine vert". Là c'est se payer la tête des citoyens au son endiablé du "C'est pas grave, on replantera !".
Contrairement à Tours, les "Verts" ne sont restés amorphes. Il se sont même retrouvé en pointe pour la mobilisation et c'est sur leur site que j'ai trouvé le 8 mars 2011, le témoignage suivant de Guifrey. On y trouve en plus de nombreux arguments développés dans le présent ouvrage, auxquels les Verts de Touraine ont refusé de souscrire. Pourtant ceux de Metz sont dans la même situation, dans la majorité municipale du maire Socialiste, Dominique Gros, mais ils semblent fâchés, puisqu'ils estiment qu'il a "un exercice monarchique de sa fonction".
Quelle liberté de ton ! Il existe donc en France des Verts courageux se souciant un peu d’écologie. Avec les siens serviles jusqu’au massacre accompli, la ville de Tours n'a vraiment pas eu de chance pour son patrimoine arboré…
Pour la 2ème année consécutive, nous assistons, impuissants, à un véritable désastre patrimonial et environnemental en ville. Malgré les protestations des habitants de Metz et des associations de protection de l’environnement, des abattages massifs d’arbres continuent à Metz.
Les responsables de la ville et de Metz Métropole essaient de faire avaler la pilule aux messins à coup de contre vérités :
- « Les arbres abattus seront remplacés » : Un arbre pousse de 50 cm par an en moyenne et parvient à l’âge adulte vers 30-40 ans. Les arbres coupés seront donc effectivement remplacés … dans 30 ou 40 ans, si on les laisse vivre jusque là … et entre temps on aura coupé les autres !
- « Les arbres étaient malades et dangereux » : C’est faux dans la plupart des cas ! Sur les 75 arbres abattus en 2010 rue du Gué à Magny, seuls 5 étaient en état de dépérissement (sans être dangereux pour autant). Les autres ont été vendus pour faire des planches et on ne fait pas de planches avec du bois en mauvais état.
- Ces arbres doivent être abattus pour permettre l’aménagement d’infrastructures écologiques nécessaires aux habitants de Metz : Encore une contre vérité ! L’écologie est un concept global dont toutes les composantes (déchets, eau, déplacements, biodiversité…) ont une égale importance.
Les arbres en ville sont partie intégrante du patrimoine et les services qu’ils rendent sont multiples et indispensables au bien être et à la santé de tous : microclimat plus doux et air plus pur, production d’oxygène, puits de carbone, pompe à nitrates et phosphates, contribution à un cycle de l’eau plus calme, ombre estivale, support, abri et source de biodiversité animale (oiseaux, chauves-souris, insectes et invertébrés associés) et végétale (lichens, mousses et autres épiphytes) etc. On ne peut donc jamais prétendre à des aménagements écologiques au prix de réels dégâts environnementaux.
Les écologistes ne sont pas des passéistes qui s’opposeraient à des aménagements nécessaires au confort des messins. Ils déplorent un manque de concertation avec la population, l’opacité des décisions, le refus du dialogue et une conception déjà dépassée de certains projets urbains. Ils dénoncent la gestion archaïque des espaces verts, où les arbres sont considérés comme du mobilier urbain, des objets jetables et remplaçables et non comme des êtres vivants absolument nécessaires au mieux être et à la santé des habitants.
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Le 18 mars, sous le titre "Massacre à la tronçonneuse", Guyfrey explique comment les Verts ont symboliquement manifesté sur la place Saint Louis contre l’abattage massif des arbres à Metz :
Dans un décor de sapins artificiels parsemé de bûches, ils ont distribué des tracts aux passants pour expliquer en quoi l’abatage des arbres à Metz est un exemple caricatural des politiques environnementales incohérentes développées par la quasi-totalité des collectivités territoriales.
A grand renfort de communication, celles-ci se gargarisent de développement durable pour verdir leurs grands projets d’infrastructures. Ecoquartiers ‘bidon’, concours de maisons fleuries, expositions naturalistes, promotion nunuche du tri sélectif : tout y passe dans le registre du degré zéro de l’écologie.
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Oui, on trouve partout la comm' qui nous lessive les esprits…
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8.2.7 Bordeaux, Besançon, Calais, Nantes et ailleurs
Voici d'autres cas de mobilisation contre des abattages en milieu urbain, trouvés sur la Toile. Là aussi, j'ai mis le sigle de la méthode Germain* ˜ quand la description des faits semble lui correspondre, en me fondant sur deux de ses trois caractéristiques, la troisième étant potentielle.
Abeilhan (Hérault) 2011
Sur le site www.petitionenligne.fr :
Nous, soussignés, citoyens de la commune d’Abeilhan, nous nous opposons fermement à l’abattage de tous les platanes bordant l’avenue Molière, direction Alignan-du-Vent. Abattage que vous projetez d’effectuer en vue de créer un premier tronçon de 100 mètres de piste cyclable, votre projet global définitif prévoyant une longueur totale de 500 m de piste cyclable, laquelle n’étant prolongée ni en amont ni en aval par une voie de même usage.
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Alfortville 2011
Sur le site 94.citoyens.com :
Un certain nombre d’habitants de la rue, attachés à leurs tilleuls […], forts des conseils de l’ex-jardinier en chef du jardin du Luxembourg de Paris, réclament une expertise indépendante. La mairie accepte et fait venir le cabinet Pierre Grillet qui conclut que 94 % des arbres sont bien portants, 2% légèrement altérés et 4% altérés. […] Un compromis est finalement trouvé […]
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Angers 2010
Tous les arbres de la rue de Létanduère ont été abattus pour le passage du Tramway
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Auxerre 2010
35 arbres sur les quais de l'Yonne, pour un parking, "dans une logique du tout automobile" (lettre ouverte au maire)
Bagnolet 2009
Avenue Gallieni et quelques arbres pour un réaménagement de la gare routière. Selon le site des Verts www.bagnoletenvert.com, ce sont des abattages "sans la moindre explication, curieuse amélioration !".
Besançon 2010
87 platanes du quai Vieil Picard, 2010, pour un tramway. Un internaute témoigne sur son blog :
Je trouve cela outrant !! De mon point de vue, Besançon n’a pas besoin de tram. La ville est bien desservie en bus, il est donc inutile de détruire le patrimoine pour faire bonne figure devant les grandes villes. C’est pitoyable.
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Témoignage d'une internaute sur un blog :
Etre pour ou contre le tram est un débat où chacun a son opinion. Riverains du pont Battant, défendons nos arbres !!
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Besançon, les platanes du quai Vieil Picard (photo Denis Costille)
Bordeaux 2008
L'espace boisé du Grand-Parc. L'association "Villages de ville" annonce le 30 septembre 2008 que :
La résidentialisation serait mise au frigidaire et les arbres arrêteraient de tomber. […] Mais rien ne se serait fait sans la mobilisation des habitants du quartier, qui, comme lors de la lutte pour le maintien de la ligne 15, ont signé massivement la pétition pour sauvegarder l’espace boisé de notre quartier. Si près de 100 arbres sont tombés, pour la plupart vieux de plus de quarante ans, l’hémorragie a été stoppée grâce à leur intervention et nous les en remercions. […]
Toutefois, la direction de Villages de Ville restera vigilante, que ce soit sur les intentions d’Aquitanis ou celle d’In-Cité, car le plan de résidentialisation, avec ces arbres abattus, ces constructions de parkings gigantesques et ces ventes d’appartements étaient inclus dans un plan d’ensemble concernant tout le parc immobilier social du Grand-Parc.
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Bouzigues (Hérault) 2008
4 des 7 acacias sur la place Clémenceau ont été abattus malgré la mobilisation :
Des arbres malades, selon les services municipaux qui avaient diligenté une expertise il y a déjà quelques années de cela. Un diagnostic qui ne satisfaisait pas les riverains opposés à l’opération, lesquels demandaient une nouvelle expertise et, surtout, un peu de patience.
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Calais 2008
7 arbres pour 7 places de parking, l'association "Opale Ecologie" :
La destruction de cet îlot de verdure est indéfendable pour ces écologistes et tous espèrent pouvoir laisser la vie sauve à ces puits d'oxygène, en sous effectif dans ce secteur de la ville.
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Carcassonne 2009
Les Verts de l'Aude sont attentifs au sort des platanes, nombreux sur leur département. Ils soutiennent les actions du collectif "Touche pas à mes platanes" et de l’association "Arbres et routes". Même si le lieu du délit n'est pas urbain, il convient de signaler ici la reproduction en leur site www.aude.lesverts.fr d'un article de L'Indépendant du 23 mai 2009 qui présente une sorte de jurisprudence, établie par le tribunal correctionnel de Carcassonne. Tous les défenseurs des arbres seront intéressés à en prendre connaissance. Extraits :
Tout commence le 15 janvier dernier, à Mireval-Lauragais, lorsque les trois hommes sont arrêtés par les gendarmes alors qu’ils portent des inscriptions sur des platanes, situés sur la D 623, en direction de Castelnaudary. "Ces arbres centenaires et en parfaite santé étaient condamnés à l’abattage, explique Jean Labourgade, l’un des trois prévenus. Nous avons cherché à savoir pourquoi, mais toutes nos demandes de rencontre, notamment auprès du conseil général, ont été refusées".
A l’origine, le substitut Hébert voulait une procédure de reconnaissance préalable de culpabilité. Mais les trois auteurs de cette "dégradation légère" avaient refusé, préférant la tribune que leur offrait un jugement public. […]
Les trois hommes ont rappelé qu’ils avaient été "interrogés séparément pendant quatre heures par des gendarmes". Ils ont souligné avoir utilisé du lait de chaux, "remède contre les parasites" pour inscrire leurs messages ("Non" "SOS Abattage" "Help") sur les arbres. Ceux-ci avaient été abattus peu de temps après, ce qui relativise fortement la portée du délit...
"Le lait de chaux est certes inoffensif, mais pas pour les parasites", a audacieusement lancé le substitut Hébert.
"C’est extraordinaire que ceux qui défendent les platanes soient renvoyés devant le tribunal. D’autant qu’il n’y a eu aucune dégradation ! L’infraction ne tient pas et n’est même pas poursuivie. D’ailleurs, il n’y a pas une seule jurisprudence pour ce délit. Ces gens disent qu’on peut concilier la vie des arbres et la sécurité routière. Ils réclament le dialogue qu’ils n’ont pas eu". Le message a été entendu par le tribunal qui a ordonné la relaxe.
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Carcassonne, les trois militants relaxés pour avoir badigeonné de chaux des arbres condamnés (Photo du journal L'Indépendant)
Donc, retenez bien cet emploi du lait de chaux. Voyez comment en faire sur la Toile, c'est principalement un mélange d'eau et de chaux.. Il se trouve aussi en commerce prêt à l'emploi sous le nom de "blanc arboricole".
Coutances (Manche) 2010
47 arbres pour une piste cyclable. "Entre 100 et 200 personnes sont passées par le rassemblement". "Des enfants ont aussi dessiné les 47 arbres promis à l’abattage". Le 14 juin 2011, Ouest-France annonce que 18 tilleuls du Boulevard Le Gentil de la Galaisière ont été abattus, sous les yeux d'une élue de l'opposition qui a fait constater l’abattage par un huissier de justice. "Le permis d’aménager pour la réalisation d’une voie verte avait été reçu en mairie vendredi". Ah c'est donc pour créer une "voie verte", quel cynisme ! Interrogez les cyclistes, ils sont presque tous amis des arbres…
Mauguio (Hérault) 2008
Les feuilles mortes et les racines gênantes sont les prétextes d'abattage des platanes de l'avenue Gaston Baissette lors de sa réfection en 2008, malgré l'indignation des riverains.
Martigné-Briand (Maine et Loire) 2011
Ici, ce n'est pas une ville ou une banlieue, mais un village. Ca me permet de signaler que les mobilisations contre les abattages m'apparaissent êtres rares dans les villages ou bourgs, je suppose que c'est le reflet d'une meilleure concertation. Voici un article du site lepost.fr du 18 février 2011, alors que 4 ifs ont déjà été abattus :
1200 personnes de toute l'Europe et d'ailleurs à signer une pétition pour que dans un cimetière, on n'abatte pas un séquoia de 150 ans... Le maire et une partie de son conseil municipal, a pris une délibération (à huit clos, dehors les journalistes et le rare public des conseils municipaux de villages ! ) visant à faire disparaître l'arbre géant et à le déraciner.
Motivation principale : quelques racines de l'arbre dérange la déambulation des fauteuils roulants, par ailleurs impossible dans les allées eu égard à l'épaisseur de sable et d'une forte déclivité. Un aménagement paysager est envisageable mais n'effacera pas la pente naturelle.
Principal oubli : l'arbre centenaire se trouve en bas du cimetière et se nourrit chaque jour d'environ 500 litres d'eau. L'arbre est lui-même entouré de quelques cyprès centenaires faisant eux aussi office de l'équilibre hydrique dont l'environnement a besoin. Coupant et déracinant le géant, l'eau va rapidement être difficile à canaliser. La crainte dans un univers boisé, humide, par nature donc fragile (cercueils, tombes) c'est que la mérule, lèpre du bois, ne s'installe et tisse une toile terrifiante dans tout le village.
Vociférant, le maire aujourd'hui a refusé de recevoir la presse et Jérome Hutin, photographe professionnel et grand spécialiste des arbres vénérables. L'échange aurait pu être cordial, voire salvateur. Il n'a pas eu lieu : "L'arbre sera abattu, je l'ai décidé".
Le patrimoine arboré ainsi constitué est en grand danger. Seul maintenant le préfet par le classement de l'arbre centenaire en tant que "patrimoine naturel" dispose des leviers pouvant infléchir les tronçonneuses.
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Le séquoia a été abattu 5 jours plus tard, le 23 février 2011.
Meaux 2010
Juin 2010, sur le site www.meauxleforum.fr, le président de l'association "Meaux Environnement" s'adresse au maire, M. Jean-François Copé :
A la surprise générale - ce projet n’ayant fait l’objet d’aucune concertation préalable - on nous annonce brutalement que les 21 platanes qui ombragent cet espace depuis des décennies seront purement et simplement abattus début juillet ! Et ce, afin de réaménager le parking existant qui passerait de 43 places à 31… Pourquoi une telle précipitation ?
Les arguments avancés par votre équipe pour justifier cet abattage brutal, qui n’est pas sans nous rappeler tristement celui de La Grenouillère, sont pour le moins surprenants : les feuilles mortes qui tombent en automne seraient dangereuses. Les racines de ces platanes mettraient en péril les fondations des maisons riveraines…
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Plus tard, une autre explication est avancée :
La reconfiguration du cours de Verdun semble faire l’objet d’une détermination bien arrêtée. Et elle débute par l’abattage imminent de 21 superbes platanes, à seule fin de réaliser un espace de stationnement légèrement différent de l’espace actuel, plus réduit, et d’un abord beaucoup plus tarabiscoté.
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Le 20 juillet 2010, les photos des arbres abattus sont publiées…
Platanes abattus à Meaux (photo Téhel 2010)
Montpellier 2011
Montpellier, le collectif "Une place pour tous" se plaint à plusieurs reprises d'abattages, notamment le 31 janvier 2011 :
Encore des arbres centenaires abattus à Montpellier. Trois arbres, dont au moins un centenaire, ont été coupés sur un terrain en centre ville, le long de la voie de chemin de fer, entre la gare et le Polygone.
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Nantes 2011
Nantes ˜, 26 mars 2011, pour un tram-train, Ouest France :
Les riverains de la Bottière pointent du doigt l'abattage d'arbres dans le cadre des travaux du tram-train (ligne Nantes-Châteaubriant) menés par RFF, Réseau ferré de France. « Déjà en janvier, les élagueurs missionnés par RFF ont coupé des dizaines d'arbres, dont des chênes », accusent les riverains. Ces citoyens se disent choqués par la suppression d'une végétation qui donne un air de campagne à la rue du Pré-Hervé. Et ils comprennent d'autant moins que lors de l'enquête publique préalable sur le projet de la ligne tram-train entre Nantes et Châteaubriant, il était fait état de « la préservation des boisements. Il était question d'élagage mais pas d'abattre en masse ».
Aujourd'hui, les riverains craignent une nouvelle campagne d'abattage d'arbres en juin prochain […]
La mobilisation des riverains intervient alors que les affaires de défense de l'environnement se multiplient à Nantes. Bien entendu, à chaque fois, le contexte est particulier. Et la plupart du temps, (notamment dans les quartiers de Talensac, Saint-Clément ou La Pilotière), les citoyens s'opposent à des constructions trop importantes, à leurs yeux, sur des zones vertes. Mais tous ces dossiers ont bien pour point commun, une vigilance accrue des citoyens quand on touche à leur cadre de vie. Voilà bien la preuve que la place de la végétation à Nantes passionne.
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Et comment parler de Nantes, sans évoquer le projet de nouvel aéroport ? 1500 hectares sont concernés (2 chênes de 200 ans, etc.), les dégâts seront bien plus importants… Toutefois on n'est pas en milieu urbain, et c'est ici hors sujet. Pas vraiment quand même, puisque les incidences sur la ville sont fortes et pour protester, des militants sont montés sur les arbres d'une banlieue nantaise, comme en témoigne le blog IndyMedia le 2 septembre 2011 :
8h 20. Depuis ce vendredi matin, des arbres du parc Elisa Mercœur (près de Bouffay à Nantes) sont occupés par une dizaine d'opposants au projet de métropole Nantes-Saint-Nazaire, qui comprend notamment l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Les flics sont rapidement arrivés sur place et semblent avoir reçu pour ordre de nous intimider. En deux vagues, une petite vingtaine de personnes qui étaient présentes au sol ont été arrêtées brutalement alors qu'elles chantaient, diffusaient des tracts et installaient un pique-nique.
12h 58. Les camarades étaient toujours dans les arbres aux dernières nouvelles, mais des pompiers et un groupe du GIPN seraient sur place. On peut donc craindre qu'ils veuillent les déloger. La plupart des personnes arrêtées plus tôt dans la journée ont été relâchées. Il semblerait qu'il en reste 3 au poste.
14h 18. Les camarades perchés sont en train de se faire déloger en ce moment même square Mercœur. Les CRS ont chargé les personnes au sol et les compagnons dans les arbres sont en train de se faire descendre.
21h 35. Les flics avec les pompiers descendent les camarades des arbres. Les personnes sont descendues avec violence puis emmenées menottées, gazées, etc.[…] La répression de cette action d'occupation qui se voulait être un moment de dialogues et de rencontres avec la population nantaise, démontre - une fois de plus - la volonté des pouvoirs publics de museler, criminaliser, diviser et affaiblir l'opposition au projet d'aéroport.
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Le texte des tracts reprenait certaines des motivations rencontrées sur les chantiers de tramway :
Partout, la ville se transforme et se densifie. Les chantiers se multiplient. Ce sont autant de marchés juteux pour les entreprises du BTP, comme Vinci, dont l'unique souci est le profit à court terme, qu'elles qu'en soient les conséquences sociales et écologiques. Les aménageurs planifient l'urbanisation massive sans que la population n'ait aucun contrôle sur ces projets qui transforment les paysages environnants en un désert de béton.
La construction d'un aéroport à "Notre Dame des Landes" permettra de déplacer ou de réduire la zone de bruit autour de l'aéroport "Nantes Atlantique". Le bien être des habitants de la zone de bruit est un argument brandi par Jean Marc Ayrault pour des raisons bassement électoralistes. En réalité, le remaniement de la zone de bruit permettra une transformation complète de l'espace urbain : multiplication des chantiers, augmentation des loyers, segmentation de la ville entre un centre ville vitrine sous surveillance et des quartiers populaires relégués en périphérie.
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Neuilly sur Seine 2009
Neuilly sur Seine, décembre 2009, les riverains sont émus par 22 arbres abattus dans l'enceinte du collège-lycée privé Sainte-Marie, pour permettre la construction d'un parking, d'un gymnase, d'une salle de musique et de salles de travaux pratiques. "Nous avions découvert le projet un peu par hasard en avril dernier. Nous aurions aimé discuter du projet avec les religieuses mais nous nous sommes heurtés à un mur". Le maire a finalement dû jouer les médiateurs. L'élu ajoute : "C'est une propriété privée, ils font ce qu'ils veulent du moment qu'ils respectent les règles du POS* et du paysage. Ils auraient aussi pu vendre à un promoteur qui aurait pu y construire un immeuble" (d'après Le ¨Parisien). D'où l'importance d'avoir un PLU* (remplaçant du POS*) qui protège notre environnement…
Paris 4ème 2011
Jardin des Halles, le 16 février 2011, l'association de riverains Accomplir, qui a déjà déposé plusieurs recours contre le projet s'insurge :
La Ville a procédé ce matin entre 8h et 9h30 à l'abattage d'environ 240 arbres du jardin des Halles pour dégager l'emprise qui accueillera la cité de chantier de la future Canopée (toit qui couvrira le centre commercial rénové).
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Le 24 février 2011, "L'Indépendant du 4ème Arrondissement de Paris" s'insurge aussi :
Je persiste pour ma part à penser qu'il est triste d'avoir dû abattre 340 arbres en faisant comme si les arbres étaient simplement un décor urbain que l'on peut remplacer selon le bon vouloir des paysagistes et surtout des architectes.
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"Au final il y aura 513 arbres soit 43 arbres de plus", "7 arbres plantés pour 5 coupés", a répondu la mairie. Le refrain "C'est pas grave, on replantera !" est partout chanté…
Paris 15ème 2004
Sur le tracé du tramway parisien, boulevard des Maréchaux, article de "leparisien.fr" du 19 avril 2004 :
Il est huit heures, hier matin, lorsqu'une cinquantaine d'hommes, gilet jaune fluo et casque sur les oreilles, débarquent sur le boulevard Lefebvre à Paris (XVe ), aux abords de la porte de Vanves. Cinq minutes plus tard, les tronçonneuses entrent en action : sous les coups des bûcherons de la Mairie de Paris, une trentaine de platanes s'effondrent. Comme le 15 juillet dernier, lors de la première opération d'abattage d'arbres sur le trajet du futur tramway des maréchaux, il s'agissait hier d'aller vite, très vite. De limiter au maximum le traumatisme causé aux riverains et d'éviter d'éventuelles confrontations.
Certes, 600 nouveaux arbres devraient remplacer à terme les quelque 400 platanes qui vont être éliminés sur les sites des stations du tram. Mais hier les riverains étaient amers. « C'est un scandale de faire des choses pareilles un dimanche matin, pendant les vacances qui plus est ! », lâche une habitante les larmes aux yeux. « Tout cela s'est fait dans le plus grand secret pour empêcher les gens de réagir, ce ne sont pas des méthodes correctes », renchérit Othman. La mairie indique pourtant avoir distribué une lettre d'information au début du mois avertissant les riverains d'un prochain abattage. Mais sans préciser ni le lieu ni la date. Et des panneaux affichés samedi sur les abris de bus annonçaient simplement la fermeture du boulevard à la circulation.
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Paris 16ème 2011
Paris 16ème, aux Serres d'Auteuil, en 2011, la construction d'un court de tennis de 7000 places est décidée. Elle saccagera les jardins et les Serres d’Auteuil. "Tous ces projets rendraient l’ensemble de ce merveilleux domaine - jardin, serres et collections - immédiatement inexploitable. Ce serait donc signer sa fermeture pure et simple". Les adorateurs du tennis ont choisi cette destruction, les autres citoyens n'ont pas eu droit à la parole. Y compris le Tourangeau que je suis qui avait passé une journée à visiter ce très bel espace. Quel gâchis, quelle bêtise !
Dans le 16ème arrondissement, il y a aussi une alerte sur le Parc Sainte Perrine. La menace commencée en 2009 se poursuit en 2011, pour construire des immeubles. Dans les deux cas, les Verts de la majorité municipale du maire Socialiste de Paris, Bertrand Delanoë, semblent bien silencieux, alors que l'opposition de droite soutient la résistance aux abattages.
Près Saint Gervais (Seine Saint Denis) 2011
L'annonce le 23 juin 2011 de l'abattage de 170 arbres des avenues Ferrer et Jaurès, suite à une interprétation municipale d'une étude phytosanitaire des arbres. Un collectif Ferrer-Jaurès s'est formé. "Vigilance au mois d'août : si vous voyez des bûcherons dans les rues, contactez le collectif !" au son de la "Complainte des ombres sur le noir goudron".
Reims 2008
Reims et son tramway, d'après L'Union des 5 avril 2008. Ce cas est à méditer, notamment pour Tours (en corrélation avec le chapitre "Les abattages des années à venir", p 105) :
D'habitude, on pose une première pierre. Pour le tram, ils ont planté un premier arbre. […] Les riverains de l'avenue de Laon auront du mal à les croire, eux qui assistent depuis le début de la semaine au « déplumage » végétal de leur environnement. Chaque jour, de nouveaux marronniers tombent sous les dents des tronçonneuses. Chaque jour, l'avenue perd son charme et parait un peu plus grise. Mauvais moment à passer.
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Reims. Cet article du 6 avril 2011 montre que les abattages du tramway peuvent se poursuivre, et de façon importante, au delà des travaux, une fois la ligne exploitée (d'après le site de L'Union)
Et d'après l'Union du 15 mai 2008 :
Grosse émotion hier rue Thiers et place Jules-Lobet où trois tilleuls ont été massacrés par les tronçonneuses. Il en reste trois, les riverains vont se battre pour les sauver. Des tronçonneuses aux petits fours. Hier matin, pendant qu'Adeline Hazan fêtait, avec champagne et cacahuètes, le nouvel Espace Info Tram (lire par ailleurs), pendant ce temps place Jules-Lobet des riverains pleuraient sans larme sur leurs tilleuls livrés aux dents des tronçonneuses.
« Je suis écœuré. On nous dénature complètement ce qui était l'un des plus beaux endroits de Reims », se lamentait Alain, riverain de la place depuis 30 ans. Le long de la rue Thiers, de nombreux Rémois se sont arrêtés pour assister au massacre. Tous tristes de voir disparaître ces grands arbres. « Je ne suis ni pour ni contre le tram mais pourquoi ne pas éviter cela » « Un coin qui était si joli » « Comment peut-on permettre cela », pouvait-on notamment entendre. « Quel malheur ! »
Christian Messelyn, président de Mars, qui surveillait les opérations, a vu converger vers lui une bonne demi-douzaine de défenseurs des tilleuls avec qui il a dû user de pédagogie. Il n'en a pas convaincu un seul. « Bien sûr que non. Surtout qu'il nous a dit qu'il comptait faire descendre tous les arbres. Trois aujourd'hui et trois plus tard », racontent Jean-Claude et Marie-José. « Quel malheur. Ils ont déjà coupé le plus beau. Il s'agissait de tilleuls argentés qui diffusaient un parfum extraordinaire. Des employés de la mairie m'avaient dit que certains jours, ils sentaient ce parfum jusqu'à leur bureau . »
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Romainville (Seine Saint Denis)
En août 2010, avenue Rosenfeld, d'après le site lesgrands-champs.over-blog.com :
Nous sommes navrés, véritablement navrés de constater que huit semaines après que nous ayons formulé des propositions concrètes et réalistes, vous nous apportiez comme seule réponse une fin de non recevoir. […] La suppression des arbres n’est pas un argument en faveur de la sécurité. Elle participe à la déshumanisation des rues, donc à leur désertion par le public, à la disparition du lien social et favorise ainsi la petite délinquance et le vandalisme. […] Le métro et le tramway viendront s’installer à quelques mètres d’une avenue consacrée à l’automobile ! En cette année de la biodiversité vous faites reculer la nature en ville de manière irresponsable. […] En implantant 11 arbres nous aurons en moyenne un arbre tous les 46 mètres. […]
La qualité des espaces en ville ne peux pas faire l'économie de la nature en ville. Sans attendre de trouver d'accord sur un projet acceptable par tous, sans que le dialogue amorcé à la demande des habitants n'ait permis d'aboutir, les travaux ont été engagés comme si de rien était, comme si le progrès et l'intérêt général consistaient à foncer tête baissée. Résultat, la totalité des arbres abattus. Pourquoi abattre des arbres pour en replanter ? Pourquoi ne pas garder ceux qui sont en place ? Pourquoi mettre du neuf alors que l'existant n'est pas en mauvais état ?
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Saint Denis (Seine Saint Denis)
Béatrice Réfievna dénonce régulièrement sur le blog comiteporteparis.wordpress.com des arbres abattus inutilement, par exemple le 20 avril 2011 :
Des arbres adultes coupés inutilement car ils ne gênaient pas la déconstruction du parking, bien ou contraire… ces arbres adultes auraient été bien utiles pour retenir les nuages de poussières qui s’abattent sur l’entrée de la ville.
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Saint Denis (photo comiteporteparis.wordpress.com)
Saint Fons 2011, (Rhône)
Une centaine d'arbres, cèdres et peupliers plus que cinquantenaires, pour un stade.
Toulouse, 2006
250 platanes centenaires menacés par un projet de bus en site propre et ce, pour un gain de temps dérisoire, malgré l’action depuis 10 mois de trois associations : Agir pour Croix-Daurade, Arbres et Routes et les Amis de la Terre Midi-Pyrénées, malgré une pétition qui réunit 8500 signatures
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Trets (Bouches du Rhône)
Le 20 mai 2011, le site trets.free.fr présente un cas peu ordinaire puisque la mobilisation vient du Conseil Général qui fait stopper l'abattages de platanes centenaires par la mairie.
Ces arbres ont une valeur inestimable pour la beauté de notre village. Le département en a pris soin depuis cent ans, il peut bien continuer si la ville n’a plus conscience de ses atouts". "10 jours plus tard, dans un nouveau communiqué en date du 17 mai 2011, le conseil général affirme, analyses à l'appui, que le platane abattu place de la Fontaine faisait l’objet d’un suivi sanitaire régulier et que ce dernier n'était pas malade, précisant ensuite qu'ils exigeaient qu'un arbre soit replanté sur la place aux frais de la Mairie pour reconstituer l’alignement.
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8.2.8 Aussi à Bruxelles, Genève, Montréal…
Passons, pour finir, à l'étranger francophone :
Bruxelles 2011
Bruxelles, le 27 mars 2011, pour l'élargissement d'une route :
Massacre à la tronçonneuse : 300 personnes pour s'enchaîner aux 300 arbres de l'Avenue du Port ce dimanche", "L’avenue du Port, patrimoine historique et vestige de la période industrielle de Bruxelles, sera transformée en une route urbaine bien banale et les 300 platanes qui la bordent seront abattus", "Le Comité appelle à une mobilisation citoyenne pour inviter les autorités à revoir leur copie.
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En exergue ce proverbe Cri (indiens du Canada) : "Quand le dernier arbre sera abattu, la dernière rivière empoisonnée, le dernier poisson capturé, alors seulement vous vous apercevrez que l'argent ne se mange pas".
Genève 2010
Genève, juillet 2010 :
Deux cèdres centenaires ont été abattus malgré la mobilisation des riverains. [...] 300 riverains ont signé une pétition pour empêcher l’abattage de deux conifères dans le quartier de Varembé. Mais ce matin, les arbres sont tombés sous les coups des tronçonneuses [pour construire des immeubles]. [...] Hélas, cette opposition est arrivée un peu tard.
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Montréal 2011
Montréal, le 12 août 2011, le site www.cyberpresse.ca :
"Bus express sur le boulevard Pie-IX : des centaines d'arbres abattus ?". "Aujourd'hui, les bus express qui rouleront peut-être un jour sur le boulevard Pie-IX, dans l'est de Montréal, se heurtent aux arbres du Jardin botanique. Selon les plans d'aménagement du Service rapide par bus (SRB), près de 400 arbres matures pourraient être abattus le long de cette artère majeure, et des dizaines de propriétés pourraient être amputées de 1 m de terrain. C'est ce que soutiennent les maires de trois arrondissements touchés par ce projet de 300 millions de dollars, auquel ils réclament des changements majeurs.
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Sindou (Burkina Faso) 2010
1000 arbres centenaires pour élargir des artères routières.
Les deux faits majeurs posent dans l’absolu la question de la participation du citoyen à la définition de la politique urbanistique de nos cités et, particulièrement, la place et le rôle de l’arbre dans la dynamique d’urbanisation de nos villes.
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A Kinshasa (République Démocratique du Congo), on retrouve un problème similaire pour l'élargissement du Boulevard du 30 juin, mais les citoyens ne refusent pas les abattages et préfèrent faire pression sur les plantations futures.
8.2.9 La situation empire-t-elle ?
De la France à la Francophonie, j'ai donc présenté les principaux cas trouvés sur la Toile de mobilisations contre des abattages d'arbres. Estimez-vous qu'il y a là beaucoup de références ? J'ai l'impression qu'il y en a assez peu, car il y a de quoi relativiser avec le grand nombre de villes. Dans les cas présentés, la présence fréquente de la méthode Germain* ˜ est logique, car, plus que d'autres, elle provoque le refus et la mobilisation. Toutefois, il y a bien sûr les très nombreux abattages abusifs qui n'ont pas donné lieu à une contestation populaire, et aussi elle a pu ne pas être transcrite sur la Toile…
J'ai hélas l'impression que la situation empire, que la démocratie locale se délite et que les autocrates, de tous bords politiques, prennent de plus en plus leurs aises. Même si son cas apparaît extrême, la ville de Tours se révèle être tout à fait typique de cette dégradation environnementale urbaine en extension. La résistance ne doit-elle pas s'étendre elle aussi ? Les citoyens vont-ils devenir plus clairvoyants ? Allons-nous réagir pour refuser d'aller dans cette direction ?
A la lecture de ces propos, en décembre 2011, après avoir suivi avec attention les cas que j'ai présentés, Jean-Marc Sérékian, d'origine marseillaise et moins centré sur Tours que moi, m'a fait part de son désaccord :
A ce stade du livre, après tout ce que tu as vu, dit et dénoncé tu ne peux plus parler d’impression, c’est une régression dans ta démonstration. De toute évidence sur la France entière la situation empire, l’écologie urbaine défendu par les habitants est laminée et la démocratie locale se délite sous le rouleau compresseur des municipalités. Les maires de tous bords politiques, en véritable autocrates locaux, prennent de plus en plus leurs aises et forment un unanime Parti Unique de la Délinquance Environnementale.
Le cas extrême de la ville de Tours se révèle être tout à fait typique, presque un modèle national, de cette dégradation environnementale urbaine en extension. La résistance doit s’étendre et s’organiser. L’analyse de la situation tourangelle peut apporter quelques éclairages sur les rapports de forces en jeu et l’avenir de l’écologie en milieu urbain.
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Je lui ai répondu ceci :
Mon but premier n'est pas de faire une démonstration, mais de présenter des faits. S'ils permettent une démonstration, comme à Tours où j'ai pu faire un tour à peu près complet du problème, je pousse jusque là. Mais sur toute la France entière j'estime que c'est insuffisant, je ne puis rien affirmer, je ne peux qu'émettre des suppositions ou impressions. Comme souvent je vois les choses moins noires que toi. Je trouve que le nombre de cas que j'ai trouvés sur Internet n'est pas élevé, quand on considère le grand nombre de villes de plus de 50.000 habitants en France.
La situation m'apparaît contrastée, je peux dire qu'il y a un nombre important d'abus comme à Tours, mais je manque de repères historiques pour affirmer avec certitude que la situation empire. D'autant plus que Caroline Molliè trouve, elle, que ça s'arrange par rapport aux années 1960 béton... Et au début des années 90 il y avait beaucoup d'Aquavit* très combatives, la résistance était plus forte, ce qui ne veut pas dire que la dégradation était pire...
Je ne crois pas que le cas de Tours soit typique des villes moyennes, il ne l'est que pour celles, nombreuses, qui présentent des dérives démocratiques environnementales. Et toutes les villes moyennes peuvent verser dans cette dérive qui n'est pas évidente à déceler quand elle s'aggrave vraiment. Le cas tourangeau est donc riche d'enseignement pour tous.
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Ce livre présente des faits et des réflexions, les miennes, celles de Jean-Marc, celles d'autres personnes. Je souhaite que le lecteur prenne bien en compte les faits, mais qu'il se forge ses conclusions par lui-même, les nôtres servant tout de même à remuer ses méninges…
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Alain Beyrand
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