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    Les non-dits du plan climat de l'agglomération Tours-Plus

    Tours, les 25 et 30 mars 2013

    Pour simplifier, le plan climat (cf. Wikipédia) est un plan stratégique permettant de diminuer le bilan Carbone d'un territoire donné. Par rapport à 1990, la diminution doit être de 20% en 2020, de 75 % en 2050 (facteur 4). Au niveau le plus fin pour Tours, il est géré avec les communes environnantes sur l'agglomération Tours-Plus, dont le président est actuellement le maire de Tours, Jean Germain. Les CVL, Conseil de Vie Locale sont les organes de "démocratie locale" dans la ville de Tours. Il est naturel que les CVL s'intéressent au Plan Climat Tourangeau, et réciproquement.

    Hors CVL (mais l'information y avait été transmise), il y a déjà eu des groupes de réflexion d'habitants sur ce plan climat. J'y avais participé. Mon opinion est mitigée à leur sujet. D'une part, j'ai pu constater que les habitants participants vont dans le même sens et c'est satisfaisant et encourageant, d'autre part tout cela a été brassé par un cabinet parisien et il en sort des mots et des slogans qui intellectualisent la démarche en la désincarnant. Et on a l'impression que c'est aux individus d'agir, plus qu'aux collectivités. Avec le voeu candide que tout le monde fera preuve de bonne volonté.


    Entête du site du plan climat de Tours Plus

    Il y avait ce soir 25 mars une réunion inter-CVL sur le plan climat de l'agglo, "points d'étape et perspective". Cela s'est déroulé comme dans toutes les réunions municipales. Un diaporama déroule les magnifiques réalisations et objectifs, en oubliant les réalisations minables et le manque de réalisme de certains objectifs. Avec des belles formules auxquelles on ne peut que souscrire. On y plante toujours des arbres, sans en abattre... Ensuite les questions des habitants et les réponses, claires ou déviantes par rapport au sujet, permettent de se faire une idée plus correcte de l'état des lieux.

    Quelques points soulevés dans l'assistance :
    • Nous sommes très loin de l'objectif des 20 % en 2020 : en 2013 la diminution par rapport à 1990 est minime et on ne voit guère comment cela pourrait brusquement s'accélérer.
    • Les premiers pourcentages à gagner le seront plus facilement que les derniers.
    • N'y a-t-il pas besoin de doubler ce plan climat très ambitieux à un plan de financement qui permette cette ambition ?
    • Et, en réponse, on nous a laissé entendre qu'il faudrait que la croissance redémarre pour avoir ces financements. Il n'est pas évident du tout que la croissance puisse aider à la décroissance des gaz à effet de serre... Il y a là une contradiction structurelle.
    • Au plan local, on ne peut certes pas agir contre les émissions de l'autoroute et des avions. Mais on pourrait ne pas subventionner un avionneur. Quant à l'aviation militaire, importante sur l'agglo, son bilan carbone n'est carrément pas pris en compte...

    Quant à moi, j'ai posé deux questions :
    1. Malgré toutes les bonnes intentions proclamées, certaines actions municipales vont carrément à l'encontre du plan climat. Ce sont des rétropédalages. En voici quelques exemples pour la ville de Tours :
      • Des centaines de collègiens du centre-ville sont obligés de prendre le bus pour aller dans un collège à l'extérieur de la ville, alors qu'il y a un collège où ils pourraient aller à pied et on le ferme (cf. le collège Pasteur).
      • On abat des arbres cinquantenaires ou centenaires et ce ne sont pas les arbres que l'on plante qui permettront de les remplacer en 2020 et aussi en 2050. Cette biomasse verte, qui diminue le effets des gaz de serre des diverses émissions, décroit donc, ce qui va dans le mauvais sens. On arrive même à avoir des arbres émetteurs de carbone, ceux en bac qu'on transporte plusieurs fois dans l'année en un trajet de 12 kms vers le bois des Hates.
      • Elever des tours plutôt que des bâtiments bas est énergivore. L’énergie grise contenue dans les matériaux de construction n’est pas prise en compte (voir notamment cet article).
      • On ne facilite pas les circulations à vélo et à pied, notamment par la multiplication des voies, les tergiversations sur les passerelles St Cosme et Fournier.
      Contre ces comportements, de quels recours disposent les citoyens ?
    2. Un bilan global sur l'agglo peut cacher des disparités. Par exemple, il a été question de planter 10.000 arbres, mais ça ne concerne pas Tours entre Loire et Cher. 2. De plus pour qu’ils deviennent de vrais puits de carbone, il faut qu’ils puissent vieillir, qu’ils ne soient pas abattu tous les 20 ou 50ans. Un suivi plus fin, par zones, est-il possible ?

    C'est Mickaël Cortot, conseiller municipal de la ville de Tours qui a répondu :
    1. Il a contesté les quatre points que j'ai présentés en partant sur des sujets annexes, notamment la densification et les contresens cyclistes (qu'il m'a accusé de désapprouver, ce qui est faux, sauf de façon exceptionnelle), ou en évoquant les plantations d'arbres qui vont tout réparer. Bref une réponse à la Germain. Mais ma question n'était pas là et il m'a fallu insister pour qu'il réponde sur les recours : il n'y a que le tribunal administratif d'Orléans, procédure très lourde ayant peu de chance d'aboutir, d'autant plus qu'aucun tribunal administratif en France n'a prononcé un jugement au nom du plan climat (et c'est très rare pour la Charte de l'environnement). Autant dire qu'il n'y a pas de recours.
    2. Il a dit que des bilans par territoires se mettent en place, sans plus de précision.

    Ma question ne s'adressait pas à un godillot du maire, braqué sur le fait que je ne peux qu'agir négativement (et qui le fait sentir...), elle était posée aux trois responsables du plan climat de Tours Plus. Leur silence est hélas éloquent. Quand je parlais de recours, je n'avais pas en tête une action en Justice, je voulais seulement savoir si, dans les moyens d'action de Tours Plus pour respecter les objectifs très difficiles du Plan Climat, il était prévu d'avoir un dispositif pour lutter contre les régressions. Et si ce dispositif pouvait s'enclencher sur des demandes citoyennes.

    Ce silence technicien et cet enfumage politicien entrent dans la logique d'un système qui oblige ceux qui sont employés à la réussite de ce plan à être dépendants, au sens employé-patron, des municipalités qui, selon leur humeur, vont ou pas dans le "bon sens climat". Les techniciens ne peuvent officiellement que dire oui-oui aux élus, ou faire semblant de ne rien voir quand ceux-ci aggravent le Bilan Carbone, ce qui est hélas très courant. Se taire. Subir.

    C'est bien joli de faire appel aux bonnes volontés, mais je trouve, en proportion, qu'il y en a beaucoup moins chez les maires que chez les simples habitants. C'est d'autant plus grave que, on l'a vu avec les exemples que j'ai donnés, un maire a un pouvoir de rétropédalage bien plus puissant qu'un citoyen. Et un pouvoir d'enfumage confondant : mettre en avant l'arrivée de quelques chèvres dans la plaine de la Gloriette et cacher l'obligation imposée à des centaines d'écoliers d'aller chaque jour au collège en bus plutôt qu'à pied, c'est une lamentable gabegie !

    En complément : Le site du plan climat de l'agglo et la page de l'AQUAVIT sur le Plan Climat.
    Et cet article du Monde du 18 avril 2013 que si la France respecte ses engagements en matière de lutte contre les gaz à effet de serre, c'est essentiellement grâce à la crise.

    Alain Beyrand
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